Malades et Méthodes

Le travail a porté sur les patients qui étaient suivis pour cirrhose dans le service d'Hépato-Gastroentérologie (HGE) de l'Hôpital du Haut Lévêque en France durant la période de dix années (1992 à 2002), puis dans le service d'HGE du CHU Kamenge au Burundi (2003 à 2009). A l'Hôpital du Haut Lévêque, les malades avaient eu une IRM avec au moins un nodule hépatique confirmé histologiquement être un carcinome hépatocellulaire (CHC). Les résultats IRM ont été comparés à l'échographie réalisée au plus dans les deux mois qui précédaient l'IRM. Une première étude a porté sur la période 1992 à 1997 puis de 1998 à 2002. Au CHU Kamenge, par défaut d'IRM et de Scanner systématiques, les malades suivis pour cirrhose ont été examinés par un Radiologue expérimenté (plus de 5ans d'expérience) utilisant un appareil d'échographie haute résolution HITASHI EUB 625 équipé d'une sonde linéaire et d'une sonde sectorielle à balayage électronique couplé à un module doppler couleur et doppler pulsé. N'ont été inclus comme cirrhotiques que les patients ayant un ou plusieurs signes cliniques et/ou échographiques et/ou biologiques (taux de prothrombine TP, Facteur V) de cirrhose

Résultats

La série bordelaise (Hôpital Haut Lévêque) comportait 214 patients ; 172 (80,4%) hommes et 42 (19,6%) femmes. L'âge moyen était de 64,2 +/- 10,1 ans. Les principales étiologies de la cirrhose étaient l'alcool : 96 malades (44.9%), l'hépatite virale C : 62 malades (29.0%) et l'hépatite virale B : 23 malades (10.7%). La majorité des CHC (78.5%) étaient Child A et B. 90 patients (42.1%) avaient un taux d'αfP >300ng/ml. Les 214 malades (100%) ont bénéficié d'une IRM qui a isolé au total 447 nodules (un ou plusieurs nodules par patient). L'échographie a été réalisée chez 190 malades (88.8%). Durant la période 1992-1997 : 56 patients sur 122 (45,9%) avaient une échographie normale. Cependant, l'IRM a isolé 116 nodules chez eux. Parmi eux, 35 patients (28,7%) avaient 72 nodules inférieurs à 3 cm. Dans la période 1998-2002 : 22 patients sur 68 (32,3%) avaient une échographie normale mais 44 nodules en IRM. Parmi eux, 17 patients (25%) avaient 39 nodules inférieurs à 3cm. La série de Bujumbura (CHU Kamenge) comportait 174 patients ; 129 (74,1%) hommes et 45 (25,9%) femmes. L'âge moyen était de 53 +/- 10 ans, avec des extrêmes de 18 et 88 ans. Les principales étiologies de la cirrhose dans cette série étaient l'hépatite virale B : 71 malades (40.8%), l'alcool : 46 malades (26,4%), l'hépatite virale C : 32 malades (18.4%). Dans le cadre du suivi et dépistage, les patients consultaient irrégulièrement dans un intervalle variant entre 6 et 18mois. Seuls 12 malades ont consulté au moins trois fois en dehors d'un symptôme (évoquant ou pas une pathologie hépatique). Les principaux motifs évoqués étaient les coûts élevés des consultations et des examens, le manque d'intérêt dans le dépistage vu l'inaccessibilité du traitement des CHC au Burundi. Le manque d'IRM et de preuve histologique pour les nodules a été un handicap pour le diagnostic formel de CHC. Parmi ces 174 malades, 58 patients (33,3%) avaient un taux d'αfP significativement élevé (>300ng/ml). L'échographie a isolé des nodules >5cm dans le parenchyme hépatique chez 91,3%. Ces malades sont tous décédés dans les 12mois qui suivaient. 46 malades avaient un taux d'αfP entre 300ng/ml et 100ng/ml. Parmi eux, 6 malades avaient des nodules de plus de 5 cm, 3 avaient des nodules de plus de 3cm mais <5cm et 12 patients avaient des nodules de moins de 3cm. Pour les 70 patients ayant un taux d'αfP <100ng/ml, seuls 8 malades avaient des nodules (tous de moins de 3cm).

Conclusion

L'échographie a certes des limites dans le dépistage précoce de CHC par rapport à l'IRM qui est de plus en plus utilisée en Occident (de même que le scanner). En Afrique, l'amélioration du dépistage passerait dans le court terme par le renforcement des capacités et compétences en échographie, l'éducation des patients pour le dépistage et l'amélioration de la prise en charge du CHC.

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